GDC : Trip Hawkins sans détour
06 Mars 2007 -
Trip Hawkins est ce qu'on appelle une sommité dans le monde du jeu
mobile. Un de ces parcours exemplaires que rêvent de suivre bon nombre
des participants de la Game Developers Conference. L'actuel CEO de
Digital Chocolate a en effet pour lui un CV long comme le bras avec
surtout à son actif une oeuvre : Electronic Arts. Le leader mondial de
l'édition vidéoludique aujourd'hui est ainsi né par la grâce de l'ami
Trip qui l'a créé et dirigé jusqu'en 1991. Hawkins passé entre-temps
par 3DO, a fondé Digital Chocolate en 2003. Une réussite atypique dans
le monde du jeu mobile puisque sans grande licence, ce tout petit
développeur-éditeur est parvenu à imposer des titres comme Tower Bloxx ou Tornado Mania. En affirmant haut et fort que l'avenir du jeu mobile est à la création spécifique pour le mobile, quitte à faire du casual.
C'est
peu de dire que son intervention en ouverture de la partie mobile de la
GDC était attendue, l'homme étant réputé pour son franc-parler. Pas de
souci de ce côté-là, Hawkins a même crédité le public de piques à
l'encontre d'un rival, Mitch Lasky, l'actuel président de EA Mobile.
Ce-dernier s'était en effet exprimé l'an passé à la même tribune au nom
de Jamdat qu'il dirigeait alors, en affirmant que ceux qui ne
possédaient pas de hit en préparation à l'heure où il parlait,
n'avaient aucun avenir. Hawkins à la tribune, cité par nos confrères de
MobileIndustry,
a ainsi répliqué qu'à l'époque, Digital Chocolate ne travaillait sur
aucun hit. Mais que la société est toujours vivante parce que des jeux
ont quand même fonctionné. Parce que les méchancetés ne sont pas si
courantes en public, cette leçon d'Hawkins : " Je voulais juste
que Mitch sache qu'il avait tort : nous sommes toujours là. C'était la
même chose dans les années 80, quand je construisais Electronic Arts.
Cela a pris une décennie avant qu'on ait notre premier hit, mais nous
sommes vraiment restés fidèles à nos convictions. Une dernière question
pour toi Mitch : où en est Jamdat Bowling ? C'était pas ça le grand hit
en préparation ? Eh bien, il n'est pas sorti. Là encore, si tu te
donnes suffisamment de temps, les choses changent."
Moins
puéril et plus intéressant, Hawkins a par ailleurs une nouvelle fois
défendu avec fougue le casual ou plutôt la création de jeux
spécifiquement pensés pour les téléphones et donc pas simplement
adaptés des PC-consoles. La première raison pour laquelle c'est sur ce
segment que les éditeurs et développeurs doivent viser plutôt que sur
les marques issues des univers PC et consoles, c'est selon lui que 5 %
seulement des utilisateurs de jeu sur téléphone sont des hardcore
gamers. Hawkins a aussi souligné qu'économiquement le système des
licences tel qu'il est appliqué dans le jeu mobile n'est pas viable.
Une anecdote pas très précise mais disons parlante présentée comme ça :
le bon Trip aurait une fois rencontré un "grand propriétaire de licences" qui affirmait exiger 4 % des bénéfices d'un jeu GameBoy sous licence, 7 % pour un jeu Playstation et 50 % pour un jeu mobile. " Clairement, l'industrie du jeu mobile ne peut aller nulle part avec ce genre de coûts pour les licences."
Dernier argument : l'intérêt pour le consommateur. Parlant du développement de portages : "Il
n'y a pas vraiment de valeur créative ; c'est simplement fournir aux
gens ce qu'ils ont déjà vu ailleurs, en essayant de leur en refiler une
version inférieure sur mobile. Cela, c'est abuser le consommateur,
c'est abuser l'éditeur, c'est abuser l'opérateur téléphonique. Et si
c'est ce sur quoi on veut baser cette industrie, honte à nous !" On imagine le tonnerre d'applaudissements.